INfluencia : le retail media est une activité en plein essor en France. Considérez-vous pour autant que les distributeurs sont matures ?
Cyril Bourgois : le marché nâest pas encore à sa pleine maturité. Certains distributeurs vont plus ou moins vite. Ils ont pris conscience que leur donnée a une très grande valeur pour les annonceurs. Les retailers sont très près de lâacte dâachat, contrairement à la TV ou à la radio. Ils disposent de sources de monétisation importantes et il faut sây attaquer. Si les pure players balisent la route, tout le monde continuera dâévoluer dans ce marché qui progresse avec des investissements en hausse [cette évolution est de 41 % entre le premier semestre 2020 et le premier semestre 2021, selon le SRI, NDLR.].
IN : quelle est aujourdâhui lâimportance des activités de retail media au sein du groupe Casino ?
C.B. : le retail media se déploie à plusieurs niveaux au sein du groupe Casino. La régie Infinity Advertising, lancée en octobre dans le cadre dâune joint-venture de Casino avec le groupe Intermarché, se concentrera dès janvier sur l’activité de nos deux groupes. Elle proposera aux agences et annonceurs nos emplacements et nos données en sâappuyant sur la technologie RelevanC. RelevanC, câest la société de technologie et de services de retail media du groupe Casino. Elle sert notre régie mais également des clients externes pour leur permettre dâopérer leurs activités de retail media on site et en extension dâaudience. Au sein du groupe, nous avons également Cdiscount Advertising, acteur très important non alimentaire, lâautre étant Amazon. Une quatrième source de revenus en retail media pour nous est lâinternational : nous avons notamment lancé lâactivité de RelevanC au Brésil avec GPA et nous sommes en discussions pour opérer dans un deuxième pays dès 2022.
IN : pourquoi avoir choisi de s’allier à  un groupe concurrent ?
C.B. : la taille de lâaudience est clé pour devenir un levier top of mind des agences et des annonceurs. Ces derniers ne peuvent se permettre de saupoudrer leurs investissements média. Ils se concentrent sur la TV, la radio et, dans le digital, sur ceux qui leur offrent une large audience. Nous disposions dâun média de précision grâce à la technologie de RelevanC mais notre audience ne faisait pas le poids face aux mass media. Cette joint-venture nous rend puissants en tant que média de masse avec 17 millions de profils activables dâencartés. Il a fallu pour cela réaliser un gros travail dâhomogénéisation pour que lâactivation puisse se faire de manière mutualisée. Chaque segment regroupera les données des deux groupes. Nous pourrons ainsi capter une part beaucoup plus importante des budgets des annonceurs que celle que nous obtenons chacun de son côté.
IN : nâest-ce pas compliqué de coopérer avec un groupe concurrent ?
C.B. : dans notre secteur, le fait dâêtre concurrents ne nous a jamais empêchés de mettre en place des joint-ventures dâachat afin dâobtenir les meilleurs prix. Là câest le même raisonnement : lâeffet de masse nous permet dâaugmenter les budgets médias. Nous intéresserons davantage les annonceurs. Même en étant deux, nous serons largement gagnants car le budget évolue en fonction du nombre de personnes que nous sommes capables dâactiver.
IN : le reach est-il un passage incontournable pour que lâactivation de segments précis soit rentable ?
C.B. : la force du retail media est en effet de proposer le meilleur des deux mondes : la masse et la précision. Câest un média qui peut concilier lâenvoi ciblé dâun message personnalisé à une base massive dâaudiences. C’est de plus un média qui a l’avantage de tout mesurer, à la différence des autres médias: on peut savoir si la personne exposée a consommé ou pas.
INÂ : comment font alors les retailers clients de RelevanC qui veulent faire du retail media mais ne disposent pas dâun volume dâaudiences massif ?
C.B. : il y a aura sans doute une tendance à la formation de networks à lâavenir. Ce sera soit de manière proactive soit parce quâune même technologie pourra servir de base à cette offre mutualisée en se branchant à leurs inventaires et à leurs données. Câest vers cela que le web tend.
IN : cela signifie-t-il que RelevanC pourrait à lâavenir offrir une sorte de base mutualisée rassemblant les inventaires et les données de plusieurs de ses clients ?
C.B. : ce nâest pas exclu, cela pourrait être une possibilité. Demain en effet, la longue tail des distributeurs pourrait être un marché intéressant, à condition de pouvoir se structurer dans le cadre de networks. Les agences et les annonceurs auront besoin de ce type de dispositif. Cela pourrait être envisagé à un stade ultérieur de développement du marché. Ceci étant, on a pour le moment fort à faire avec de nombreux distributeurs de grosse taille qui ne sont pas encore équipés.
source : www.influencia.net