Depuis le mois dâavril dernier, la Commission Européenne souffre dâune grande cote de désamour de la part des activistes écologiques européens. Et pour cause : lâexécutif européen appelle ses administrés à se prononcer, jusquâau 22 octobre prochain, au sujet dâune possible déréglementation des plantes et aliments génétiquement modifiés. De quoi secouer davantage que la seule moustache de José Bové. « Un cadre juridique applicable aux plantes obtenues par mutagénèse ciblée et par cisgénèse, ainsi qu’aux produits destinés à l’alimentation humaine et animale qui contiennent de telles plantes ». Pour Bruxelles, ce nouveau cadre juridique permettrait de contribuer aux objectifs du Green Deal et de sa stratégie « de la ferme à la bouche ». « L’initiative maintient les objectifs de la législation actuelle en ce qui concerne un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale, et de l’environnement », assure la Commission. Un avis loin dâêtre partagé par tout le monde.
« Mais pourquoi maintenant ? » direz-vous. Pas les OGM, « pas après tout ce que vous avez fait ». Pour la Commission, il sâagit dâassouplir la législation pour permettre lâutilisation de certains organismes issus des NTG â Nouvelles Techniques Génomiques â, à savoir les plantes obtenues par mutagenèse ciblée et par cisgénèse. Le texte, qui sera accompagné dâune analyse dâimpact, couvrira également les denrées alimentaires et les aliments pour animaux dérivés de ces plantes. Les animaux et les micro-organismes, de même que les autres NTG, n’entrent pas dans le champ d’application de cette initiative, tout comme l’utilisation des NTG dans les médicaments, qui sera quant à elle abordée dans le cadre de la stratégie pharmaceutique de lâUE.
Une politique hors du temps ?
Il nâen fallait pas tant pour provoquer la colère de plusieurs dizaines dâONG début septembre, prêtes à en découdre à coups de casseroles. Lâassociation Générations Futures a même déclaré que « la déréglementation empêcherait les citoyens de savoir ce qu’ils mangent et les agriculteurs de savoir ce qu’ils sèment. Les propositions de la Commission franchissent des lignes rouges en matière de biosécurité, de transparence de l’information et de protection des consommateurs. Elles doivent être rejetées ». Un argument sur le manque de transparence évident du dit cadre, qui, dans une époque de méfiance généralisée à lâégard des pouvoirs publics, devrait éveiller la vigilance de bon nombre de citoyens européens. Pour Francesco Sottile, professeur à lâUniversité de Palerme et membre du bureau exécutif de Slow Food Italie : « les nouveaux â et les anciens â OGM sont totalement incompatibles avec lâagroécologie. Ils ne sont profitables quâaux agriculteurs pratiquant la monoculture et refusant dâadopter des techniques qui permettraient dâaméliorer la résilience des terres et des zones rurales ».
Plus récemment, le 4 octobre dernier, câétait au tour Slow Food, le mouvement pour lâalimentation et la biodiversité, de se présenter comme le porte parole de la majorité des européens qui « ne veulent pas de nouveaux OGM dans leurs champs ni dans leurs assiettes ». Pour lâassociation, ce texte ne répond absolument pas aux enjeux de son époque comme le promet la Commission, bien au contraire, et ne ferait que « tomber dans le piège de la technologie ». Pire, il se baserait essentiellement sur des études biaisées, incomplètes et totalement subjectives, notamment une étude datée dâavril 2020 qui stipulait « que les NGT pourraient profiter à la société européenne », car elles permettraient dâaméliorer la durabilité des systèmes alimentaires. Slow Food avait alors répondu le 6 juin dernier en publiant une note de synthèse demandant que la régulation actuelle reste en vigueur. En compagnie de 60 autres organisations de la société civile, le groupe avait également répondu conjointement à la Commission « afin dâexposer en détails leurs multiples préoccupations concernant son rapport ». Sans nous faire lâavocat de qui que ce soit, espérons que ces nombreuses craintes, justifiées, inciteront les membres de la Commission Européenne à un peu plus de transparence. Continuer dâavancer dans cette direction en gardant leur cuisine en interne ne ferait quâendommager une planète qui nâen a définitivement pas besoin⦠et la confiance de millions dâeuropéens déjà bien entamée.
source : www.influencia.net