La France qui roule et la France qui porte ou Le goût des oppositions

15 septembre 2020

 

En France, on aime bien les oppositions. Traditionnellement, les riches et les pauvres, la droite et la gauche, la ville et la campagne et, de façon générale, toutes les oppositions de milieux, de régions et même d’époques. Nos comédies y puisent leur inspiration et leur succès. La grande vadrouille, Les Visiteurs, Qu’est ce qu’on a fait au Bon Dieu ?, La vie est un long fleuve tranquille ou Bienvenue chez les Ch’tis. Pas toujours du grand cinéma, mais des comédies efficaces qui plaisent.

 

Il y a une vingtaine d’années, Jean-Pierre Raffarin, alors premier ministre, renouvelait le genre avec sa France d’en haut et sa France d’en bas. Pourquoi pas. Force est de constater que, depuis peu, les France binaires s’enchaînent à un rythme effréné comme si ce mode de classement nous offrait des réponses aux différents dérèglements que nous vivons. Sont ainsi apparues, la France du nouveau monde et la France de l’ancien monde, puis la France des ronds-points (fin de mois) et la France des centres-villes (fin du monde) et, plus récemment encore, la France du monde d’avant et la France du monde d’après. Mieux vaut ne pas s‘absenter trop longtemps sous peine de ne plus s’y retrouver.

 

 

Encore une opposition

 

Pourquoi ne pas tenter ici une nouvelle opposition, née du temps passé cet été dans les gares. La France qui roule et la France qui porte. La seconde est devenue minoritaire. Elle continue de porter ses bagages à bout de bras ou sur son dos quand la première, largement majoritaire, fait rouler tout ce qu’elle trouve, même des cartables. Les caddies sont devenus les nouveaux paniers. Plus que deux façons de se déplacer dans l’espace, cette opposition révèle deux rapports au monde.

 

 

Pour la France qui roule, ce sont les autres qui doivent s’adapter.

 

La France qui roule fait fi de l’autre. Le bras est tendu, le bagage est derrière, tenu à distance, et ce qui n’est pas visible n’existe plus. Pour la France qui roule, ce sont les autres qui doivent s’adapter. Si un bagage roule sur vos pieds, c’est que vous n’avez pas su le voir venir et vous écarter à temps.

 

 

La France qui roule se croit à l’écart des contraintes.

 

Elle a choisi de ne pas choisir. Elle ne veut renoncer à rien. Ne rien laisser derrière elle par peur de le regretter. Pourquoi devoir choisir ce que l’on emporte puisque rouler ne demande aucun effort ? Et si une valise à roulettes ne suffit pas, une plus grande et même une seconde feront l’affaire. Certaines sont tellement grosses qu’elles pourraient contenir celui ou celle qui les tirent.

 

 

La France qui roule s’impose, s’étale et occupe l’espace

 

Enfin, la France qui roule s’impose, s’étale et occupe l’espace davantage que la France qui porte, même un sac à dos. Les valises à roulettes sont comme des ombres portées qui prolongent les corps et privatisent l’espace public. Depuis qu’elles règnent sur les gares, leurs quais devraient être deux fois plus grands pour éviter les scènes de chaos.

 

 

Ceux qui portent entretiennent un forme de respect avec le monde d’après

 

Egocentrisme, désir de s’affranchir des contraintes et tentation d’occuper l’espace collectif, la France qui roule capte parfaitement les principaux travers de notre époque. Les vérités se cachent toujours dans les détails. A côté de la France qui roule sans limite et parfois sans conscience, celle qui porte semble bien peu attractive. Elle ne porte que ce qu’elle peut porter et entretient avec son environnement une forme de respect, fruit du désir de ne pas gêner. Pas question ici de condamner ceux qui ont les roulettes faciles. Simplement de leur suggérer que, pour rejoindre le monde d’après, porter est davantage recommandé. Car le chemin est abrupt et semé d’obstacles.

 





source : www.influencia.net

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