La responsabilité des marques au risque de l’inflation ?

31 mars 2022

Être responsable, dans toutes les dimensions de sa vie comme dans sa consommation, n’est plus une option pour les Français. Ou plutôt n’était plus une option, avant la réapparition de l’inflation dans leur vie sous une forme qu’ils n’avaient pas connue depuis des années. Mais les temps changent. La pression des prix qui montent, inexorablement, et parfois furieusement – de 80 à plus de 100€ pour faire un plein de diesel de 50 litres en 3 mois… – change déjà la donne dans les dépenses de consommation courante des classes moyennes avec lesquelles nous dialoguons depuis 2007. Et si, demain, c’était leur rapport à la responsabilité sociale et environnementale qui changeait ? Et pas pour le meilleur, en ce qui concerne les marques ?

La responsabilité, ça devrait être pour tout le monde.

Ça devrait. Depuis 2007, c’est en effet la première fois qu’un rejet aussi clair, sans ambiguïté, provocateur même se fait jour sur les plateformes que nous animons, révélateur d’un état d’esprit encore minoritaire, mais qu’il faut entendre.  « Consommer responsable n’est absolument pas une préoccupation pour moi en ce moment, je n’ai pas l’argent d’acheter du bio ou du made in France. L’industriel étranger à petit prix me convient très bien.»[1] Tout se passe comme si un mouvement qui semblait il y a encore quelques mois irrévocable – et facilité par l’augmentation bienvenue du pouvoir d’achat suite aux confinements de 2020 et 21 – était tout à coup entravé pour les Français les plus fragiles. Comme si ce qui était non seulement souhaitable, mais nécessaire pour tous, devenait inatteignable pour certains.

Quand l’inflation réactive toutes les frustrations de la crise du pouvoir d’achat.

C’est que l’inflation réactive ce que le Covid et le quoiqu’il en coûte avaient masqué. « Je pense que tout augmente, on ne peut nier l’évidence. Moi mon salaire est bloqué depuis 10 ans. A un moment, ça va craquer. ». Ce qui était sinon oublié, du moins momentanément calmé revient en force, sous une forme d’autant plus inattendue qu’elle est rendue plus dramatique encore par la violence de la guerre, et les dérèglements économiques qu’elle accroît. Le vocabulaire de la frustration qui était le leur revient en force dans les mots des Français, comme en 2008 – et en 2008, la crise du pouvoir d’achat n’avait pas été précédée des 2 ans de pandémie, d’enfermement et de stress sanitaire qui exacerbent les pensées négatives des plus en difficulté.

La responsabilité va-t-elle devenir un sport de combat? 

Un sport de combat, c’est ainsi que Bourdieu parlait de la sociologie, cette discipline qu’il concevait comme la compréhension des rapports de force qui dictent non seulement les rapports entre les classes sociales, mais leur façon de voir le monde, leurs valeurs et leurs comportements de tous les jours. On peut se demander si, à mesure que consommer responsable devient aussi un sport de combat, la responsabilité ne va pas devenir, elle aussi, un marqueur de classe impitoyable. Un signe d’appartenance et de réussite pour certains – ceux qui vivent dans les métropoles où la mobilité peut être douce, pour qui acheter bio est devenu une évidence facile à mettre en acte, pour qui la hausse des prix du diesel ne signifie pas moins de déplacements pour voir leurs proches parce qu’ils roulent déjà à l’électrique. Un facteur d’exclusion supplémentaire pour d’autres – ces Français des classes moyennes et modestes qui font ce qu’ils peuvent depuis des années pour consommer mieux, mais se trouvent aujourd’hui confrontés au mur de l’inflation, demain à l’interdiction d’entrer avec leur vieux véhicule dans les ZFE où la consommation heureuse et responsable continue comme avant.

Demain, la responsabilité sans les marques ?

C’est pourquoi il va falloir que les marques soient, plus que jamais, aux côtés des Français et notamment des plus vulnérables. C’est pourquoi il va falloir qu’elles fassent de l’inclusion le préalable de toute démarche de responsabilité. Qu’elles donnent plus que jamais les moyens de consommer, sans avoir le sentiment de se sacrifier, à ceux qui ne les ont pas ou qui demain ne les auront plus, si la poussée inflationniste de ce début 2022 se confirme. Sans quoi, le risque est réel qu’ils les remplacent purement et simplement par des produits et des pratiques qui leur permettent déjà de s’en passer –enseignes anti-gaspi qui sont le new Bon Coin, troc, DIY, achat groupé de biens et de produits alimentaires hors circuits traditionnels, sorties à domicile, seconde main non plus en complément mais en substitution pour se faire encore un peu plaisir… Des produits des pratiques qui leur offriront peut-être moins de satisfaction imaginaire que leurs marques et leurs enseignes préférées, mais leur donneront le pouvoir de mettre leur consommation en accord à la fois avec leurs convictions et leurs moyens du moment.

[1] Inflation, le retour Р̩tude FreeThinking, mars 2022





source : www.influencia.net

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