La transition écologique sâest imposée aux premiers rangs du débat public et la presse dâinformation sâen fait naturellement lâécho. Bien sûr à lâoccasion des catastrophes climatiques et des grands sommets internationaux, mais aussi au jour le jour, révèle lâétude « La transition écologique dans la presse française, émergence et consolidation dâune notion » menée par LâAlliance pour la presse dâinformation générale avec la plateforme de veille média Aday et LâObSoCo. « On entend parfois dire que les médias nâen font pas assez pour informer le public sur la transition écologique. Au moment des discussions sur la loi climat, nous avons voulu voir comment la presse dâinformation sâétait emparée de ces sujets », explique Florent Rimbert, responsable développement numérique, qui sâest impliqué dans lâétude au sein de LâAlliance. Lâanalyse des contenus publiés entre 2011 et 2021 dans 278 quotidiens nationaux et régionaux montre que ces derniers ne sont pas du tout passés à côté du sujet. « Il y a un temps pour les réseaux sociaux et les influenceurs mais le temps long et le travail de passation sur les travaux scientifiques est fait par nos médias. Nos nombreux journalistes suivent les dossiers, écrivent des articles et donnent le ton médiatique sur le sujet », ajoute-t-il.
L’attention à la transition écologique augmente de 183 % en dix ans
Sur près de 180 millions de documents analysés, 230 811 articles traitaient principalement de la transition écologique, chacun représentant un ou plusieurs sujets. Les retombées presse publiées sont passées de 9 300 en 2011 à 26 340 en 2020, soit une hausse de 183 %. « Les médias se mobilisent énormément autour de sommets internationaux (Accords de Paris, COPâ¦) ou dâévénements climatiques, mais une longue traine se maintient au-delà . Chaque pic sur un événement précis amène des volumes dâarticles plus importants », observe Florent Rimbert. Lâutilisation du terme de « transition écologique » a crû de 23 983 % sur la période et a définitivement dépassé celui de « développement durable » en juillet 2018. Il était apparu pour la première fois dans le débat public en juillet 2008 quand un journaliste du Parisien avait demandé à Jean-Louis Borloo, alors ministre de lâEcologie : « Qu’allez-vous faire pour accélérer la transition écologiqueâ¯? ». Le mot « canicule » a vu son usage augmenter de 669 % entre 2011 et 2021. Les médias ont aussi contribué à faire émerger les mots « écologiste » (+ 413 % en 10 ans) ou « extinction » (+ 522 %). Le concept de « jour du dépassement » croît quant à lui dâun facteur 15 sur la durée du corpus avec (seulement) 20 occurrences en 2010 et… 367 en 2021 !
« Climat » et « politiques énergétiques et transport », premiers ex-aequo
Malgré lâaugmentation des volumes, la hiérarchie des sujets est restée assez stable sur la période avec trois sujets dominants : en 2020, le climat concernait 20 % des articles étudiés (contre 15 % en 2010), tout comme les politiques énergétiques et le transport, suivis des activités humaines et industrielles (16 % en 2020). Les 44 % restants étaient éclatés entre une dizaine de sous-thématiques. Lâimpact de la pollution sur la santé concerne 6 % de lâensemble des sujets en 2020 et a connu sa plus forte visibilité lors des pics de pollution atmosphériques. La même année, 4 % des sujets étaient consacrés à la biodiversité, un thème qui avait aussi été mis en avant lors incendies dans le sud de la France (2017) ou en Amazonie (2019). « Tous les sujets sont identifiés depuis longtemps et continuent dâêtre traités, avec des phénomènes plus récents ou visibles depuis ces 4 à 5 dernières années, comme la collapsologie, note le responsable développement numérique. Les récits sur lâengagement des entreprises et des activités industrielles en matière de responsabilité sociale et environnementale sont aussi plus nombreux. Câest un des facteurs qui va évoluer dans le temps car les entreprises y mettent des moyens. Les médias sâen feront forcément lâécho. »
Les rapports du GIEC Ã lâorigine des plus gros pics
Lâattention à la transition écologique tient beaucoup à la grande sensibilité des médias aux sujets concrets et réels : + 273 % dâarticles sur le climat, + 193 % sur la santé, + 193 % également sur la biodiversité⦠Les journaux dâinformation ne se contentent pas de recenser les catastrophes dans un traitement « factuel ou sensationnaliste », note lâétude. En effet, près dâun tiers (32 %) des articles relatifs au climat traitent aussi des conséquences sur la biodiversité ou s’intéressent à lâadaptation des acteurs politiques (25 %). Dans les sujets consacrés au climat, 24 % des articles relayaient des rapports scientifiques, les plus gros pics de visibilité étant enregistrés lors de la publication des rapports du GIEC, notamment ceux de novembre 2018 sur le réchauffement de 1,5 degrés de la planère et de juillet 2019 sur lâutilisation des sols et sur lâocéan. De manière un peu surprenante, lâétude ne montre pas de vraie différence entre régions dans la manière dont les journaux traitent des sujets sur la transition écologique. Si, en Bretagne, les journaux traitent des activités humaines et industrielles un peu plus que la moyenne (20 % contre 16 % en moyenne), la différence nâest pas considérable.
Seule Greta Thunberg se hisse au rang dâ« objet » médiatique
Parmi les deux sujets dont le volume dâarticles croît le plus sur la période, on retrouve ceux sur lâévolution des comportements individuels (+465 %), notamment autour de lâéco-repsonsabilité, et dâautres sur lâengagement citoyen et militant (+ 437 %), un sujet directement lié à lâaction des ONG et associations comme Greenpeace, WWF, Extinction Rebellion⦠Il est aussi très associé (20 %) à lâadaptation des acteurs politiques, ce qui pourrait témoigner « des efforts militants pour réorienter les politiques publiques dans le sens de lâécologie », note lâétude. Les médias contribuent par ailleurs à faire émerger des figures de la transition écologique. De ce point de vie, le traitement réservé à Greta Thunberg est un exemple marquant. Son émergence sur la scène médiatique en décembre 2018 a fait lâobjet de 72 articles dans les médias étudiés et jusquâà 940 lorsque Time lui a consacré sa Une en juillet 2019. Si la jeune militante n’est pas le seul nom propre qui ressort de l’analyse – on y trouve aussi ceux de Donald Trump, Nicolas Hulot, Delphine Batho ou Pierre Rahbi et Yann Arthus-Bertrand – elle est la seule personnalité qui soit détectée par lâanalyse de Topic modeling comme un « objet » médiatique spécifique et cohérent.
source : www.influencia.net