Le design, source de progrès durable

29 octobre 2021

Les membres de l’ADC réunis lors de « In Design We trust » (*)

La crise écologique fait rage et touche, aussi, les designers. En première ligne face aux nouvelles attentes des marques et aux exigences des consommateurs, ils sont plus que jamais concernés par le problème. « Le design, source de progrès durable » : les quelque 350 designers professionnels réunis lors de la 5e édition de « In Design We trust » (*) étaient invités à plancher sur le sujet.

 

Entre urgence climatique et société de décroissance

En filigrane des débats, l’urgence climatique. «Dans les pays industrialisés, où le progrès fait rage, on est rattrapés par une réalité commune : la crise écologique. Le progrès, d’accord, mais on n’a pas de planète B », constate Valentine Perreira (Bronson). «La planète brûle», s’alarme Matthieu Dessemme (Big Youth). Les consommateurs, eux, questionnent les marques. Anne-Sophie Royer (SGK Brandinage) l’affirme : «58% des Français attendent que les marques prennent leurs responsabilités dans la résolution des grands problèmes de notre société ». « Les consommateurs attendent des entreprises qu’elles soient les vecteurs du changement, pointe Claire Coudoré (CBA). Ils sont de plus en plus attentifs aux labels et aux notations».

Pris dans cette double tourmente, les designers sont d’autant plus concernés que malheureusement, regrette Matthieu Dessemme (Big Youth), «nos métiers contribuent aussi à cette crise écologique. Trop de papiers, trop d’encres, trop d’emballages, trop de plastiques… Dans le monde digital, aussi, trop de pollution avec des mails et des data centers qui explosent ». Géraldine Karolyi (17 mars) et Martin Iselt (Leroy Tremblot) en conviennent : «Le métier de designer n’est pas à proprement parler exemplaire en matière de progrès durable, et nos clients ne sont pas forcément irréprochables ».

Or, si comme le rappelle Delphine DAUGE, présidente de l’ADC et de SGK Brandimage, «imaginer et construire un monde meilleur, plus juste, plus transparent et plus inclusif est l’affaire de tous et le nôtre », reste à savoir « comment les designers vont pouvoir accompagner les marques, les préparer et préparer les esprits à une société de dé-consommation et de décroissance ».

 

La création au service de la transformation

La toute première des réponses, c’est « une réflexion collective sur l’éco-conception que les agences elles-mêmes doivent mener pour conseiller les marques, mais aussi pour changer leurs propres comportements », estime Delphine DAUGE. Mais la clé de voûte de la transformation, c’est la créativité : «Grâce à elle, on va pouvoir apporter des idées, des réflexes aux marques avec lesquelles nous travaillons. Le design est une source de progrès durable et les marques peuvent contribuer positivement au changement. ».

«Les agences ont un rôle à jouer pour réinventer et révolutionner les codes des marques », considèrent Yovanna Wallet (Landor), Elise Cousi et Bertrand Klein (Extrême).

 

Vers un design « frugal » : less for more

La transformation, ce n’est «ni d’arrêter de vivre pour réduire notre empreinte carbone, de défigurer les villes pour baisser les émissions de gaz à effet de serre, ni de multiplier les labels », affirment ensemble Dounia Alexandra Dassar (Dragon Rouge) et Emmanuel Lorry (BlackandGold). L’objectif n’est pas non plus de «revenir au Moyen-Age » s’amuse Victoria Pullen (JoosNabhan). Quant à la sur-utilisation du vert, « couleur-totem de l’éco-engagement », elle est devenue à la fois inutile et contre-productive pour Anne-Sophie Royer (SGK Brandimage) et Léa Mathieu (Ecobranding).

Alors, par progrès durable, qu’entend-on exactement ? Si le progrès, aujourd’hui, «c’est modifier sans cesse l’existant, c’est toujours plus haut, toujours plus loin, toujours plus de superlatifs, toujours plus de fonctionnalités» affirme Valentine Perreira (Bronson). L’enjeu du progrès durable c’est donc « de trouver comment on peut continuer à faire plus avec moins» explique Nicolas Scheffer (4uatre). «En gros faire plus simple, plus sobre, plus minimaliste », résume Claire Coudoré (CBA). Cette notion de less is more est déjà intégrée dans les métiers du design, insiste Nicolas Scheffer (4uatre) : «On sait déjà faire. Mais il faut aller plus loin et aller vers le less for more».

 

Eco-conception et biomimétisme

Penser progrès durable, c’est opter pour des solutions ingénieuses et une innovation frugale. Avec l’éco-conception, bienvenue au royaume du système D, de la récupération, des matériaux économes, locaux, recyclés, upcyclés, biosourcés. De la mode au bâtiment, de la décoration à l’aéronautique, la publicité, l’alimentation, ou le monde viticole cité par Coralie Deloffre (Team Creatif) et Laurent Jossec (Crepuscule), tous les secteurs sont concernés et les exemples ne manquent pas.

En matière d’éco-conception, Laurent Moreau (Pixelis) livre sa recette : « Il est question de trouver un bon équilibre : enlever ce qu’on peut, conserver ce qui est nécessaire à sa juste place, aux bonnes proportions pour arriver à la composition parfaite en ajoutant une pincée de responsabilité ». Chaque geste compte et les designers doivent simplement faire appel au bon sens, rappelle ainsi Claire Coudoré (CBA) : « Le choix typographique, l’interlignage, les graisses, le taux d’encrage, le poids des fontes, les formes, les couleurs, les supports d’impression, les matériaux, les vidéos, les images..». Il faut «réduire l’impact carbone des marques, le blanc pour l’impression, le noir dark mode pour les écrans, adopter des couleurs désaturées… », complète Anne-Sophie Royer (SGK Brandimage).

Penser progrès durable, c’est aussi se souvenir de cette phrase de Léonard de Vinci : «Scrute la nature, c’est là qu’est ton futur ». «La nature est le plus vaste laboratoire de recherche et développement, relève Amélie Tertian (Extrême). En l’étudiant, en l’imitant, on peut inventer des matériaux, des procédés moins polluants, plus durables, moins énergivores, recyclables ». La nature, gisement inépuisable d’idées adaptables à une multitude de secteurs. Cette démarche dite « biomimétique » ou « bioinspiration », « à l’exacte intersection entre le design, la science et l’ingéniérie, s’avère plus actuelle que jamais », considère, Lou Andréa de Clerck (Mazarine Atelier Pascalie).

 

Une formidable opportunité pour le métier

Si l’éco-conception oblige les designers à adopter un nouveau point de vue, c’est aussi selon Claire Coudoré (CBA) « un vrai argument tangible de l’engagement sociétal des marques et de leurs raisons d’être, une démarche valorisante pour nos métiers et notre contribution à l’effort collectif de la planète. Qu’on se le dise : faire simple, sobre, c’est l’opportunité de revenir à l’essence même de notre métier de designer : démontrer une véritable utilité et une fonctionnalité ».

Pour Victoria Pullen (JoosNabhan), « c’est surtout une formidable opportunité, le point de départ de toute création. Dompter une page blanche, conserver son regard d’enfant pour réinventer les possibles tout en conservant le bon équilibre. On revient aux fondamentaux du métier de designer».

En matière de design durable, Dounia Alexandra Dassar (Dragon Rouge) et Emmanuel Lorry (BlackandGold)  concluent : « Il y a urgence mais il n’est pas trop tard ». Un optimisme que partage Delphine Dauge : « Nous sommes convaincus que le design va faire de grandes choses pour demain ».

 

(*) La 5e édition des rencontres annuelles de l’ADC « In Design We Trust » s’est tenue le 14 octobre dernier à Paris  en présence de 350 professionnels du secteur.

 

Delphine Dauge, Présidente de l’ADC.





source : www.influencia.net

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