L’incroyable dérive des titres d’articles pendant le Black Friday

1 décembre 2021


On s’est régalé (non).

« Oh regarde, Amazon a encore pulvérisé un prix ! » © Antonioguillem – stock.adobe.com

Les titres chocs à leur paroxysme

Un aspirateur à un prix « sidérant », une enseigne qui « régale » avec une trottinette, un excellent smartphone à « 1 euro (et c’est tout !) », une offre VPN qui « met la concurrence à terre » ou fait « trembler le web »… Ces dernières semaines, certains blogs auront fait des choix détonants pour attirer le chaland. Cette tendance n’est pas nouvelle, mais le Black Friday aura poussé ces sites web à aller encore plus loin. Trop loin, sans doute.

Pour augmenter leurs revenus, les médias qui optent pour le modèle économique de l’affiliation ont besoin d’un trafic important et d’interfaces conçues pour maximiser les conversions. Il peut donc être tentant de dériver vers ces contenus bas de gamme, pour faire croire à l’utilisateur que l’offre du partenaire est « la meilleure depuis 2010 », et ainsi espérer le convaincre de changer de forfait mobile.

Elle a bon dos, l’affiliation !

Mais dans cette affaire, l’affiliation n’est pas coupable : il ne s’agit pas d’un modèle intrinsèquement néfaste pour la qualité de la presse française. Si des blogs ont fait le choix de tirer un trait sur leur image, d’autres sites réussissent depuis des années à concilier l’intérêt des utilisateurs et la croissance de leurs revenus. Les Numériques est un bon exemple : un contenu de qualité, un langage équilibré, une expertise reconnue… On aide l’utilisateur à trouver le produit qui correspond à son besoin, on lui permet de valider ou non une intention d’achat. Mais l’utilisateur est toujours respecté : pas de superlatifs inappropriés, pas de techniques d’incitation à la vente malvenues.

Le rôle majeur des plateformes et des algorithmes

Cette tendance des titres exagérés et du contenu de faible qualité est aussi encouragée par des acteurs influents de l’écosystème, qui soufflent dans de mauvaises directions. Facebook est souvent accusé d’encourager la viralité de contenus sensationnels, qui dépassent ou déforment la réalité. Si le réseau social est un complice historique évident, Google semble également jouer un rôle important.

Pour apparaître sur Discover (le flux d’articles personnalisé des applications Google et Google Chrome, vecteur de trafic conséquent), il est demandé aux médias d’utiliser « des titres de page qui traduisent l’essentiel du contenu, sans essayer de manipuler le taux de clics », d’éviter « les tactiques visant à augmenter artificiellement l’engagement ». Google évoque les « informations trompeuses ou exagérées dans le contenu des aperçus (titre, extraits, images) dans le simple but d’attirer l’attention » et demande aux sites, quitte à se montrer insistant, d’éviter « les tactiques visant à attirer le maximum d’internautes possible avec des contenus tape-à-l’œil, provocateurs ou scandaleux ».

Dans les faits, Google n’est pas en mesure de repérer ces techniques et valorise encore très fortement les articles qui bénéficient d’un taux de clics important sur Discover. Si des utilisateurs ont cliqué, c’est que d’autres peuvent être intéressés. La firme de Mountain View semble dépassée par l’auto-construction de ses propres algorithmes.

Une stratégie court terme qui influence la presse

Les plateformes ont un rôle à jouer, mais cela ne doit pas masquer la responsabilité des éditeurs. Et les blogs ne sont malheureusement pas les seuls concernés. Même des titres de presse quotidienne régionale s’inspirent de ces stratégies court terme et activent ces mêmes leviers. Des indices montrent que ces choix ne sont qu’à moitié assumés, quand les sites se sentent obligés de préciser que la « rubrique [est] animée par [des] experts Shopping » (sic) et que « la rédaction n’a pas participé à sa réalisation ».

Certains sites web ont œuvré pendant des années pour construire une audience, une légitimité, tout cela va disparaître petit-à-petit. C’est dommage. Les utilisateurs ne sont pas des lapins de trois semaines, chaque titre putaclic dégrade un peu plus l’image qu’ils ont des sites qui optent pour ces facilités. Entre la valeur de leur marque à long terme et leur rentabilité à court terme, ces médias ont fait un choix. Mais est-ce le bon ?

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Source : Blog du modérateur

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