« Nous devons cesser d’être dans l’excitation de faire, pour gagner en profondeur » Mercedes Erra

7 octobre 2021

The Good : toutes les entreprises vivent sous la pression d’une profonde mutation qui s’opère à tous les niveaux. Qu’est-ce qui différencie BETC dans ses engagements, ses prises de parole ?

Mercedes Erra : tout d’abord, il faut dissiper tout malentendu. Nous ne sommes jamais passionnés par ce qui nous différencie des autres… Tout en creusant notre sillon depuis la fin des années 90, nous sommes heureux que certains veuillent nous rejoindre dans cette philosophie que nous portons, et si d’autres font mieux, nous aimerions leur ressembler.

The Good : toutefois vous êtes prise aujourd’hui dans une obligation pour ainsi dire de communiquer sur ce sujet qui, s’il était avant-gardiste à une époque,- ne l’est plus désormais sous la pression politique, écologique, climatique, sociale…

M.E. : bien entendu il y a aujourd’hui une pression certaine, mais nous sommes BETC de manière constitutive. Lorsque l’on a créé l’agence en 1998, Jacques Séguéla nous a fait venir pour devenir une pétale… aux côtés d’autres pétales… Et moi je ne comprenais rien à son concept de pétale, je voulais juste monter une entreprise. Nous avons mis trois années à faire exister BETC, avons rompu avec Euro RSCG, et tandis que ses pétales s’installaient à Suresnes, nous partions dans le 10ème arrondissement de Paris. C’est là que tout s’est cristallisé. Nous avions créé un lieu différent. D’un côté, Rémi (Babinet) s’occupait du ministère de la culture et moi de celui des affaires sociales (rires). Nos confrères ou consoeurs trouvaient ça exotique… Là-bas, les voisins avaient créé une banderole, « Merci BETC » pendant la fête des… voisins justement. Partage, diversité, inclusion, féminisme, immigration, liberté de la presse, nous étions de tous ces combats qui sont les thématiques d’aujourd’hui. Et on nous traitait de bobos !

The Good : appliquiez-vous déjà ces règles à l’interne ?

M.E. : oui et c’était difficile, il ne s’agissait pas d’une mode, mais d’un combat porté par certains, dont moi, et que nous ne lâchions pas. Il y a eu aussi l’arrivée des abeilles, les jardins partagés. Ce que certains prenaient également pour de l’exotisme, ou pour une posture… et qui était simplement notre manière d’être. En 2005, on crée « le label égalité hommes, femmes », encore une avancée majeure… Plus tard, Les magasins généraux. etc.

The Good: très « exotique » encore, vous décidez, ou plutôt Rémi Babinet, vous suggère Pantin comme prochain lieu de travail…

M.E. : oui, Rémi est un malade, obsédé par Pantin, alors on y va. On se bat. C’est Le Grand Paris, l’Est c’est laid, les salariés se demandent ce qu’ils vont y faire, la ligne de métro qui y mène, craint pour les filles, le bureau éphémère fait peur, nous sommes déjà sur la réflexion d’une autre manière de travailler, et on se fait allumer par tout le monde… Encore une lubie ! entend-on…

The Good : vous êtes confrontés encore une fois à une non-vie de quartier, vous devez tout créer…

M.E. : bien-sûr, on est incapables de tout régler sur la diversité mais on fait tout pour. On fait venir des collégiens de l’Est immédiat en stage de troisième. Pour leur faire découvrir la publicité… Parce là où nous sommes puissants c’est dans notre croyance dans la publicité pour faire bouger les choses. La pub doit servir la planète, les hommes, ce n’est pas, comme beaucoup le disent une question de métier qui pousse à la surconsommation, mais tout simplement à la consommation, parce ce que nous voulons c’est une France riche, égalitaire, pas une France misérable, déconnectée… À Pantin, nous nous appliquons les règles de l’écologie aussi. Pas de clim, mais un système qui fait circuler l’air. Et puis notre cantine est exceptionnelle. On décide de mieux nourrir « les habitants ». On ne veut pas de cantine qui sent, -comme toutes les cantines-, mauvais. On veut que cela sente comme à la maison, alors on fait en sorte de casser nos œufs. On va acheter notre viande chez le boucher, le pain chez le boulanger, etc. Cela représente entre 600 et 700 repas par jour à la même heure, pour des salariés, stagiaires, qui sont accueillis, accompagnés, placés… Nous créons également des zones d’intérêt pour ceux qui ont des discussions ou des débats à mener…

The Good : au niveau du métier lui-même, comment voyez-vous son avenir ?

Il y a également un vrai sujet sur la manière de faire de la pub. N’a-t-on pas pêché à une époque par envie de se faire plaisir en voulant faire une nouvelle campagne, un nouveau film ? Une marque ne se construit pas en un an… Un Leclerc s’est toujours battu pour le pouvoir d’achat, depuis 30 ans, Saint Moret, c’est un village, une crémière, c’est frais. En revanche aujourd’hui un Carrefour ne pourrait plus dire « Avec Carrefour je positive »… Nous devons, je pense, être moins dans l’excitation de faire pour faire, et gagner en profondeur, en nuance.

 

 

 





source : www.influencia.net

agence de communication à Rennes

« Nous devons cesser d’être dans l’excitation de faire, pour gagner en profondeur » Mercedes Erra
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