Influencia : En quoi consiste votre mission, votre périmètre au COJO ?
TR : Je suis directeur exécutif en charge de la marque, des grands événements, des cérémonies. Mon équipe et moi sommes à la manÅuvre pour les cérémonies dâouverture et de fermeture, du parcours de la flamme comme des tenues, la mascotte, les médailles, le design des podiumsâ¦. Nous créons et coordonnons, en lien avec les autres directions, tous les outils liés à lâimage et à la visibilité de Paris 2024. Cette direction inclut la responsabilité de la création, ce qui est une nouveauté dans les structures des Comités dâOrganisation des Jeux Olympiques.
Pourquoi a-t-elle été créée ?
Nous devons avoir la capacité de générer des idées nouvelles pour que Paris 2024 ne ressemble pas aux autres. Pour que «nos » Jeux soient différents. Paris 2024 veut véritablement révolutionner lâorganisation et la perception des JO. Nous voulons par exemple quâils soient partagés par les Français au sens réel et concret du terme. Voilà pourquoi nous avons imaginé, pour la première fois, une cérémonie dâouverture en dehors dâun stade. La cérémonie dâouverture aura lieu sur la Seine, cela veut dire que les gens pourront librement avoir accès aux berges. Lâorganisation dâépreuves place de la Concorde procède de la même réflexion, ouvrir, accueillir, partager. Notre direction a encore donné lâimpulsion pour que Tahiti reçoive lâépreuve de surf. Pouvoir dire quâelle aura lieu sur la plus belle vague du monde, câétait important. Tel est notre rôle : impulser partout où lâon peut changer, bousculer, en respectant les valeurs des Jeux.
La cérémonie sur la Seine : comment avez-vous réussi à aller au bout de cette idée ?
Elle sâest dâabord imposée dâelle-même. Nous voulions disrupter, la Seine a été une sorte dâévidence, avec pas mal dâobstacles techniques que nous avons pu franchir au fur et à mesure. Nous avons ensuite été très soutenus par la Mairie et lâElysée et toutes les parties prenantes comme le CIO et le CNOSF. Cela a demandé beaucoup dâétudes notamment sur le plan de la sécurité
Quel est le point de départ de la réflexion ?
Les JO comportent un certain nombre de marqueurs, générateurs de souvenirs, nous les avons passés en revue puis avons travaillé sur chacun dâeux. La cérémonie dâouverture sera suivie par plus dâun milliard de téléspectateurs, comment Paris 2024 pouvait-il se distinguer ? Les JO laissent des traces matérielles (lâhéritage comme la piscine à Saint-Denis) et des traces immatérielles), je mâoccupe plutôt de lâimmatériel
Dâautres JO vous ont-il inspiré ? Londres par exemple ? Le défilé de JP Goude sur les Champs-Elysées en 1989 ?
Oui Londres entre autres, avec cette séquence de la Reine, son traitement de lâhumour, mais aussi Pékin avec ses chorégraphies incroyables. Jean-Paul Goude est lâune des premières personnes que jâai été voir, pour échanger avec lui sur ce type de projet complètement dingue, la manière de lâaborderâ¦
Faut-il sâattendre à dâautres surprises aussi fortes que celles de la cérémonie dâouverture ?
Dâautres surprises qui touchent des symboles forts des JO, oui ! Notre volonté de différence peut toucher dâautres symboles comme le relais de la flamme, la médaille olympiqueâ¦
On ne sâinterdit rien.
Quelle est votre liberté dâaction avec le CIO ?
Il nous a confié lâorganisation des Jeux. Nous devons respecter ses règles, ses valeurs. Nous sommes en lien permanent avec les équipes de Lausanne.
La pression du respect des règle RSE est-elle forte ?
Elle est au centre de tout, omniprésente. Nous avons pris un engagement fort : notre contribution carbone sera positive. Cela est possible car la beaucoup de nos équipements sont déjà existants. Et puis nous compenserons, nous serons positifs.
Quâest-ce qui change dans cette expérience par rapport à votre travail en agence ?
Ce nâest pas fondamentalement différent ! Même si là , câest un événement unique et très, très gros, avec énormément de facettes. Je ressens plus de pression. Tony Estanguet mâa fait cette proposition après que mon agence lâait accompagné lors de la phase de candidature. Je nâai pas changé ma manière de travailler : créer des ruptures.
Le fait de travailler avec des athlètes voire des Champions Olympiques, quâest-ce que cela change ?
Beaucoup de choses. Nous sommes environ 600 en ce moment, emmenés par Tony Estanguet, triple médaillé olympique et il y a beaucoup dâanciens athlètes de très haut niveau dans les effectifs. Cela crée une ambiance particulière et change un peu les méthodes. Ces sportifs, Tony le premier, ont par exemple une manière particulière de gérer le doute : en amont et à fond ! Dès quâun projet se présente, ils passent revue chaque aspect, chaque détail qui génère un doute et cherchent ou demandent une solution le plus vite possible afin que le jour J, lâaction prenne le dessus sur le reste. Câest très efficace. Le doute peut être considéré comme une faiblesse dans le monde classique de lâentreprise. Ici, on en fait un élément dâavancée. Tout cela avec une écoute, une humilité, une modestie, une bienveillance remarquable. La recherche de la performance est permanente, comme à lâentraînement. Ils avaient lâhabitude dâaller chercher des secondes ou dâautres marqueurs de réussite, ils reproduisent ce mode opératoire en embarquant toutes les équipes avec une empathie et une forme dâinflexibilité sur le fond.
Et un rythme de travail plus⦠sportif ?
Ah, ça, oui, infernal. Lorsque jâétais chef dâentreprise, je ne dormais pas toujours très bien, je travaillais beaucoup et là , câest encore plus. Câest un sacerdoce accepté, assumé, unique. A lâaspiration de champions qui ont une résistance et une condition physiques du tonnerre. Il faut sâaccrocher ! Lâexpérience est fantastique. Leur force de travail et de caractère resteront un modèle pour nous.
source : www.influencia.net